Courte présentation de mon projet de thèse (2020)

Rédigé pour l’Atelier Histoire et sociologie de l’éducation et des institutions scolaires à l’EHESS, séance du 7 novembre 2020

Je m’intéresse aux pratiques éducatives de l’école maternelle et j’essaye de montrer que l’on peut considérer ces pratiques comme des pratiques de socialisation primaire spécifiques aux sociétés modernes. Pour entrer un peu plus dans le détail, je m’inscris dans la continuité de Durkheim ou de Louis Dumont en considérant que les sociétés modernes sont des sociétés fondées sur des idéaux d’autonomies et que réfléchir sur l’éducation permet de montrer que cette autonomie individuelle dépend d’un ensemble de pratiques sociales construites historiquement. Dans ce cadre, étudier l’éducation préscolaire en particulier est une manière de se demander comment ce travail d’autonomisation des individus commence, et ce dès les toutes premières années de la vie de l’enfant.

Ma proposition consiste à approcher philosophiquement ces questions de socialisation et d’éducation dans une perspective pragmatique, en m’inspirant notamment de la philosophie de Robert Brandom. Il s’agit alors de partir des données fournies par l’histoire et la sociologie de l’éducation pour dégager les normes implicites dans les pratiques éducatives et montrer comment ces normes s’articulent à un projet d’autonomisation typiquement moderne. 

Pour cela, une partie importante de ma thèse consiste à revenir sur la formation historique des pratiques préscolaires modernes au 19e siècle. J’opte pour une approche comparative qui se développe à deux niveaux : je compare d’abord les pratiques des salles d’asiles françaises et celle des jardins d’enfants allemands vers 1850, puis, les propositions de Pauline Kergomard pour l’école maternelle de la IIIe république par rapport à celles de Montessori, vers 1890. Je pense que ce travail comparatif permettra de montrer la cohérence générale des pratiques préscolaires modernes, notamment en ce qui concerne les attentes d’expressivité que l’on a vis-à-vis des élèves, mais aussi des attentes de réflexivité vis-à-vis des éducateurs.

Une autre dimension de ma thèse, que je ne vais pas développer maintenant, vise à élever les conclusions de ces comparaisons à un niveau plus spéculatif, en proposant notamment une relecture “hégelienne” de l’Émile de Rousseau.